Atelier Régional EcoQuartier du mardi 14 mars 2017 - Prendre en compte les changements climatiques dans l’aménagement.

Les éléments scientifiques du rapport « changement climatique 2013 » du Groupe d’expert intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC) présentent des conclusions claires et solides, issues d’une évaluation mondiale du changement climatique. Ces éléments montrent, avec 95 % de certitude, que depuis le milieu du XX e siècle, l’activité humaine est la cause principale du réchauffement observé.

Ce rapport confirme que le réchauffement du système climatique est sans équivoque et que nombre des changements observés sont sans précédent depuis des décennies, voire des millénaires : réchauffement de l’atmosphère et des océans, diminution de la couverture neigeuse et recul des glaces, élévation du niveau des mers et augmentation des concentrations de gaz à effet de serre. Chacune des trois dernières décennies a été plus chaude à la surface de la Terre que la précédente, et plus chaude que toutes les décennies antérieures depuis 1850.

Les changements climatiques observés se manifestent et se traduisent, pour le grand public, par une fréquence et une intensité plus fortes d’événements extrêmes comme les vagues de chaleur ou encore les phénomènes de crues et de submersion. Selon les contextes, ces phénomènes auront des conséquences plus ou moins importantes sur la vulnérabilité des villes et des territoires. Cette vulnérabilité est bien sûr, pour une partie non négligeable, due à une concentration de population élevée dans un milieu présentant des densités bâties importantes sur des sols fortement artificialisés. Mais les conséquences des changements climatiques, qui vont intervenir dans nos territoires, vont très probablement modifier la climatologie des villes ainsi que leur exposition à des aléas comme ceux liés à l’élévation du niveau de la mer.

A l’horizon 2080, les scénarios les plus pessimistes prédisent une augmentation moyenne des températures estivales de + 5,5°C dans certains territoires du grand ouest. Ces données auront des effets sur le climat urbain et plus particulièrement les phénomènes d’Îlots de chaleur urbains (ICU) spécifiques aux villes dans un pays où 60 % des individus vivent en ville (pôles de grandes aires urbaines). Ces perspectives posent de manière aiguë la question du confort pendant ces épisodes de fortes chaleurs et bien sûr, la question de la santé des populations les plus vulnérables. De même, sur le littoral et dans les espaces estuariens, l’élévation du niveau de la mer pourrait atteindre 1 mètre à l’horizon 2100 d’après les hypothèses les plus extrêmes.

Plusieurs questions se posent. Quels seront les effets locaux du changement climatique global ? Quels sont les paramètres qui expliquent les climats urbains d’une ville, d’un quartier et son évolution ? Comment adapter la structure urbaine au changement climatique ? Comment améliorer le confort thermique d’été des espaces publics et des bâtiments ?

L’engagement n°16 de la Charte des ÉcoQuartiers précise que les écoquartiers doivent « produire un urbanisme permettant d’anticiper et de s’adapter aux changements climatiques et aux risques ». Cette attente est valable pour toute opération d’aménagement. Mais les dossiers de candidature à la labellisation fournissent encore peu d’éléments sur les mesures d’adaptation dans la programmation des espaces publics, des bâtiments destinés aux logements, aux équipements et aux activités économiques. Il est vrai que les réponses sont complexes.

Certaines solutions visant à atténuer les îlots de chaleur urbains, comme la végétalisation, la réduction de la hauteur des bâtiments pour réduire l’effet canyon observé dans les rues étroites bordées de bâtiments hauts, peuvent entrer en contradiction avec certains objectifs de la Ville Durable comme la recherche d’une ville compacte et dense, l’optimisation des réserves foncières dans les cœurs de ville, la conception de bâtiments bien isolés, l’optimisation des apports solaires grâce à la recherche d’une orientation adaptée, etc. De même, sur le littoral et dans les estuaires, l’augmentation de l’exposition des espaces urbains, soumis aux risques inondation et de submersion marine dus à l’élévation du niveau de la mer, va contraindre l’urbanisation de ces territoires.

Le sujet de l’adaptation de l’aménagement est encore au stade de l’exploration et de l’expérimentation tant dans la compréhension des processus à l’origine des modifications du climat urbain que dans la recherche de solutions. La journée n’a donc pas eu la prétention d’épuiser ces nombreuses questions mais d’ouvrir une discussion à partir de l’état des connaissances et des premières tentatives de réponses opérationnelles qui commencent à être apportées par des acteurs de l’aménagement.

Emmanuelle BASTIN de la DREAL des Pays de la Loire a livré des clés de compréhension et des ordres de grandeurs sur les scénarios d’évolution du climat et leurs conséquences dans les Pays de la Loire à partir des connaissances scientifiques disponibles. Ainsi, si aucune tendance ne se dégage du régime des précipitations comme de la fréquence et la violence des tempêtes dans les Pays de la Loire, les épisodes de fortes chaleurs comme celui que la France a connu en 2003 pourraient augmenter de manière significative (X 2) à partir de 2050 si l’on se place dans le scénario d’évolution du climat le plus pessimiste.

Julien BOUYER du CEREMA a ensuite exposé des éléments pour comprendre ce qui détermine le climat urbain et contribue à produire les phénomènes d’îlots de chaleur urbains (ICU). L’ilot de chaleur désigne l’écart de température existant entre la ville et son environnement périphérique immédiat moins urbanisé. Il se produit spécifiquement la nuit. De 1 à 3 degrès, cet écart peut monter jusqu’à 5, 6 degrés et plus dans les situations les plus extrêmes (+ 8°C à Paris en aout 2003). Cet écart de température est provoqué par la libération nocturne de l’énergie stockée sous forme de chaleur par les matériaux (immeuble, chaussée) durant la journée via les rayonnements radiatifs. Cette accumulation de chaleur est renforcée par l’effet canyon des rues qui piège la chaleur et l’activité anthropique (chauffage, climatisation, transports, activités industrielles…).

Marjorie MUSY (CEREMA) a ensuite apporté un éclairage sur différentes méthodes de mesure et de cartographie des îlots de chaleur urbains. Elle a ensuite fourni des éléments pour apprécier l’apport de ces différentes méthodes à l’action opérationnelle des villes en matière d’urbanisme (planification, aménagement). C’est à cette étape que des mesures d’adaptation peuvent être élaborées comme la végétalisation, le choix des matériaux des bâtiments, du revêtement des rues, des trottoirs et des espaces publics. L’intervention sur la morphologie urbaine (hauteur et orientation des bâtiments et des rues) est un autre moyen pour adapter le climat urbain.

Également du CEREMA, Cyril POUVESLE a prolongé cette réflexion en dressant un panorama des solutions qui existent pour améliorer l’adaptation de l’aménagement urbain à l’évolution du climat.

Céline FRECHET de Rouen Métropole, a exposé comment l’écoquartier de la ZAC Luciline— Rives de Seine à Rouen tente d’apporter des réponses concrètes aux conséquences des changements climatiques pour réduire les îlots de chaleur urbains d’une part, et prendre en compte d’autre part, la forte présence de l’eau avec la restauration d’un cours d’eau, le traitement des eaux pluviales et la présence à proximité immédiate de la Seine et sa nappe alluviale. Ces contraintes impliquent la mise en œuvre de solutions spécifiques et innovantes.

Télécharger la présentation de Céline FRECHET.

En début d’après-midi, Françoise DENIS, cheffe de service à la DDTM 44, a montré à travers le cas du PPRI Loire Aval, comment il est possible de prendre en compte les scénarios d’élévation du niveau de la mer pour organiser l’urbanisation dans les secteurs exposés de l’agglomération Nantaise.

Olivier CORBINEAU de Nantes Métropole a ensuite illustré les éléments posés par la DDTM 44 à partir du cas de la ZAC Pirmil – Les Isles où, l’aléa inondation lié à la montée du niveau de la mer, est un paramètre central de la conception de ce projet d’aménagement. D’une contrainte, le risque inondation a été transformé en atout dans le partie d’aménagement du futur quartier, en augmentant, tout en contrôlant, la présence de l’eau et de la nature. Le résultat devrait contribuer à réduire la vulnérabilité du secteur pour offrir un quartier doté d’un cadre de vie laissant une place importante à la Nature en Ville.

Télécharger la présentation d’Olivier CORBINEAU

La journée s’est terminée par un temps de dialogue avec la salle autour du film réalisé par le CEREMA La nature en ville comme élément de confort climatique (16mn14s).

Visionner le film sur le site du CEREMA

Une série de 10 films courts a par ailleurs été réalisée à partir du film La nature en ville comme élément de confort climatique mais présentant également des éléments complémentaires additionnels.

Visionner les films sur Daylimotion

La discussion s’est ensuite prolongée entre experts et acteurs de l’aménagement sur quels outils et connaissances produire pour augmenter l’adaptation de la ville aux changements climatiques.

Pour aller plus loin :

http://www.urbanisme-puca.gouv.fr/changements-climatiques-comment-les-villes-s-r83.html
http://www.popsu.archi.fr/popsu-europe/themes/ilots-de-chaleur-urbains-strategies-des-villes-face-aux-changements-climatiques
http://www.iau-idf.fr/savoir-faire/nos-travaux/edition/les-ilots-de-chaleur-urbains-1.html

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